Chypre

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Musée des Forces Aéroportées Canadiennes
CAFM

Porter rouge Vendredi

Chypre

 

L’article suivant a été d’abord publié dans le Maroon Beret de Janvier 1975

(Note: EW Skelding. MWO CD Retired, writes - "I was there, Ed Witt was not MWO. He did not clear a path through a minefield. Cpl Skelding and Cpl Maidment did. Sgt J Vasser was the Pt Sgt." Thanks for the info MWO Skelding!)

 

LE RÉGIMENT AU CHYPRE

L'an dernier c'était le 15ième anniversaire de l'invasion de Chypre par les Turcs en 1974. Durant cette période, des soldats du Régiment aéroporté du Canada était soumis au feu et encore aujourd'hui nous avons des militaires canadien et des soldat ex-aéroporté exposés au tir ennemi au Moyen-Orient.

L'invasion de 1974 a été couverte dans l'édition de janvier 1975 Vol 1, no 4, du Béret Marron. Comme projet spécial, afin de souligner cet événement, le régiment à fait traduire dans les deux langues officielles et produire, pour les membres de l'association, l'édition original de ce numéro.

Le régiment veut dédier cette production anniversaire à ceux présentement dans le «Golfe». Notre support et nos pensées sont avec eux. Dieu les bénisse.

AÉROPORTÉ!

NOTES DU REDACTEUR EN CHEF

En feuilletant ce numéro du Béret marron, je suis persuadé que vous noterez certains détails dans sa préparation qui n'étaient pas dans les numéros précédents. Il s'agit d'un numéro spécial, préparé en vitesse pour relater de façon opportune les événements survenus à Chypre en 1974.

À la lecture des articles, vous verrez qu'ils sont regroupés en quatre parties. les trois premières portent sur le coup d'État, la première offensive et la seconde offensive. En consultant la carte, vous pourrez vous situer dans l'enclave turque avant et après la première tranche des combats, puis après l'établissement par la «Force turque du maintien de la paix» de la dernière ligne apparaissant sur la carte. Un style télégraphique a été utilisé afin de décrire les événements comme ils se sont vraiment déroulés. La conclusion démontre ce que représente une guerre pour un citoyen moyen.

LE COUP D'ÉTAT

Voici une lettre adressée par un officier de régiment à sa famille; il nous a gentiment autorisé à la publier. C'est un des bons témoignages directs à des activités menées par les Forces des Nations Unies a Chypre (FNUC) après le coup d'État que l'on puisse trouver. Elle constituera le fondement du présent récit. Elle a été écrite le jeudi 18 juillet, à 1200 hrs.

Chère, ______

Je vous écris quelques mots à la hâte pour vous raconter ce que j'ai vu le jour du coup d'état.

Lundi 15 juillet, 0835 hrs. Je commence à peine mon entretien régulier avec Ie cmdt lorsque les sirènes se font entendre. Quelques minutes plus tard, suivent plusieurs explosions et des tirs d'artillerie; 0 0ps entre alors et nous annonce que les FNUC sont en état d'alerte générale, cause inconnue. À 0845 hrs, je quitte le QG du district de Nicosie, logé dans les casernes Wolseley (près de l'hôtel Ledra Palace) pour me rendre à notre base administrative (le camp des Bérets bleus (CBB)), près de l'aéroport, à cinq milles de là. Pendant le trajet, les tirs pleuvent; je dois finalement m'arrêter à un barrage routier établi sur la colline menant à l'aéroport juste au-delà du dernier rond-point. Des soldats de la Garde nationale tiennent le barrage routier et ma jeep est environ le septième véhicule en file. J'attends là pendant trois heures. À 0855 hrs, la tête d'une colonne de 14 chars T-34 et de 6 TTB BTR 152 franchissent le rond-point en direction du centre-ville. Vers 0910 hrs, ils attaquent le palais présidentiel (réduit en ruine en moins d'une heure), la Chambre des représentants, la station de police de Paphos, le QG de l'Unité de réserve tactique (URT) d'Athalassa et l'immeuble de la station de radiodiffusion de Chypre. Deux chars demeurent au rond-point et, à intervalles irréguliers, tirent des rafales de mitrailleuse de calibre 0,50 en l'air. À 1100 hrs, trois BTR 152 transportant des troupes se rendent a l'aéroport pour y achever l'URT. Vers midi, la Garde nationale chypriote grecque a le plein contrôle de Nicosie. Dans l'après-midi elle participe à des combats isolés et attaque la résidence archiépiscopale; et s'empare également de l'hôpital central au moyen de troupes et mitrailleuses antiaériennes (à quatre canons) de calibre 0,50.

Pendant que j'attends au barrage routier, je peux utiliser le réseau de commandement Motorola des FNUC et leur donner un compte rendu de la situation assez intéressant. Lorsque j'arrive au CBB (a 1200 hrs), je constate que la cie logistique a déjà exécuté les procédures de combat et qu'elle est prête - tache accomplie professionnellement malgré «le désordre» qui règne à la base du contingent canadien.

Dans l'après-midi et la soirée, le col Beattie, cmdt du contingent et sous-chef d'État-major (SCEM) des FNUC est affairé à rédiger des messages à l'intention du MDN et des Affaires extérieures, car nous n'avons pas d'ambassade sur place. Nous apprenons également que «M» pourrait être vivant et en bonne santé et qu'il serait dans son vieux royaume de Paphos. Je retourne ensuite a Nicosie pour un groupe d'ordres puis au CBB pour informer la cie de logistique. J'apprends qu'un 707 de la Olympic Airways (grec) s'est posé à l'aéroport. Dans la nuit de mardi, à 0100 hrs, je peux enfin aller me coucher chez-moi, à la ligne verte. Les tirs se poursuivent toute la nuit. Mardi matin, je traverse la ville en voiture pour aller au travail. Les rues sont désertes; exceptés les chars et quelques réservistes aux yeux fous et aux cheveux longs. Je passe l'avant-midi avec le col Beattie et j'apprend de «M», ses exhortations au peuple et sa demande d'assistance aux Nations Unies. Nous organisons également l'évacuation des 70 vacanciers retenus sur l'île.

Dans la soirée, un violent échange de tir d'armes légères se déroule au palais de justice, donne sur l'arrière des casernes Wolseley. La situation est très inconfortable avec des projectiles perdus qui sifflent de partout. Plusieurs autres petits combats sévissent également autour de la ville.

Le mercredi, le couvre-feu est levé pendant quelques heures et le centre-ville de Nicosie semble avoir repris son allure normale, à l'exception des chars et des troupes. Les stations de police locales sont réouvertes et le peuple respecte l'ordre de rendre toutes les armes. Je n'ai pas fait grand chose cette journée-là.

Le jeudi, quelques chars quittent la ville et le couvre-feu est levé pendant le jour. L'aéroport est réouvert; nous attendons un Hercule cet après-midi pour sortir les vacanciers.

Je n'entrerai pas dans les détails politiques qui touchent Athènes, Londres, Ankara, New York, etc, et l'évasion de «M», puisque vous en savez probablement davantage que nous à ce s sujet, même si nous captons le service international de la BBC depuis la zone de la base britannique. Le fait que le coup d'état s'enlise me préoccupe grandement, car les nouveaux chefs chercheront un bouc émissaire et pourraient prétendre que les Nations Unies aident «M». Ceci pourrait avoir des répercussions sur nos troupes dans les rues.

Pendant ce temps, le contingent canadien et les FNUC ont rempli leur mission. Jusqu'à maintenant, nous avons réussi a empêcher toute forme de violence à la ligne verte, en maintenant notre présence malgré certains dangers aux postes d'observation (PO), en aidant et en rassurant les Turcs a tous les niveaux et en mettant en garde les Grecs, a tous les échelons, contre les conséquences de toute provocation des Turcs, même accidentellement. Le quartier turc a été la cible de quelques projectiles perdus et a quelques blessés; ils se sont alors mobilisés et menace de se venger. Nous avons toutefois pris les mesures pour garder la situation bien en main.

Au plus fort du combat, le lundi, nous avons abandonné 2 PO en raison des dangers inhérents mais ils ont été réoccupés plus tard. En une heure nous étions revenus au statu quo; nous avons alors raffermi notre présence. Les troupes ont fait de l'excellent travail.

Un tout dernier problème se pose à nous: la Garde nationale grecque veut prendre possession de la grande quantité d'armes (suffisamment pour armer une brigade) illégalement importées en 1972 et placées sous la garde des Nations Unies. J'espère que cette situation ne sera pas la source d'un affrontement. (Je veux dire pendant que nous étions ici).

Voilà où on en est à ce jour. Il y a eu de nombreux échanges de tirs, et nous avons été extrêmement chanceux de n'avoir aucun blessé accidentel. Plusieurs de nos bâtisses ont été atteintes de projectiles. Nous n'avons jamais perdu notre liberté de mouvement à la ligne verte mais nous ne pouvions nous rendre là où les autorités croyaient que nous n'avions pas d'affaire. Elles avaient probablement raison.

Je vous embrasse _______

Le coup d'état a complètement pris les FNUC par surprise. Il est vrai que la scène politique n'a connu aucun répit de tout l'été - bombardements à Famagouste, arrestations par l'Unité de réserve tactique des partisans de l'EOKA B, plans du gouvernement pour réduire la durée de service des membres de la Garde nationale et projets menaçants du président pour purger la Garde nationale de ses officiers grecs - et d'autres actions, y compris la possibilité d'un coup d'état, étaient à prévoir. Cependant, tel que mentionné dans la lettre, jusqu'à 0835 hrs le lundi 15 juillet les FNUC vaquaient à leurs occupations régulières.

BASE DU CONTINGENT CANADIEN

Il convient d'expliquer ce qu'on entend par «désordre» au sein de la cie logistique. Sous le commandement du capt L. Bowen, cmdt A de cie en l'absence temporaire du cmdt, le maj Harries, la cie logistique exécutait des préparatifs d'urgence: organisation d'une défense périphérique, occupation des points de contrôles, entreposage des munitions dans un endroit plus sûr, et chargement des munitions d'armes d'appui dans les véhicules appropriés prêts au déploiement.

RÔLE DES FNUC

Les observations formulées au sujet des FNUC et des soldats canadiens accomplissant leur mission nécessitent des explications. La communauté chypriote turque, comme on pouvait s'y attendre, était très nerveuse après le coup d'état. Les FNUC et le QG du District de Nicosie ont rassuré le bureau du vice-président en confirmant que le coup d’état, dans la mesure ou l'on pouvait en juger, était une intervention interne menée par les Chypriotes grecs; cependant, mais c'est surtout la ténacité des soldats affectés aux PO et les patrouilles actives faites par le peloton de reco à la ligne verte qui ont contribué à les rassurer. Quelques exemples de l'assistance offerte par les FNUC.

Seulement une PO a été vraiment abandonné; il s'agit du Roccas Bastion, car il recevait de nombreux projectiles d'armes légères perdus lors de l'attaque de la résidence Electra; il a été réoccupé une heure plus tard. Les occupants du PO Paphos Gate ont reçu l'ordre de remonter 100 mètres sur la rue Paphos, car l'attaque de la station de police les incommodait de nombreux tirs. Ils ont regagné leur position initiale par la suite.

L'intervention faite dans la soirée de mardi est un autre exemple des efforts déployés par les Nations Unies pour résoudre le conflit. Les Turcs se plaignent de recevoir des obus de char du secteur Omorphita. Le major K.C. Eyre se rend alors sur les lieux avec son chauffeur, en plein milieu de la nuit, pour examiner la situation. Se trouve sur place un seul char T34 qui bombarde une fabrique de crème glacée abandonnée et les obus perdus atterrissent dans l'enclave turque. Le maj Eyre explique au chef de char le problème et propose de se placer de l'autre côté du bâtiment. Ce dernier, très coopératif, s'empresse de déplacer son char; et continue à bombarder la fabrique par l'autre côté.

Nous pourrions citer d'autres exemples, mais à quoi bon. Le contingent a fait tout en son possible pour empêcher que ce coup d’état «intracommunautaire» ne dégénère en un conflit «intercommunautaire». N'eut été de l'intervention de l'armée turque cinq jours plus tard, il aurait réussi.

Outre le cas des deux PO ment1onnés et les coups tirés dans la zone des logements du peloton de reco, la ligne verte ne présente pas grand danger. Le danger était de circuler en véhicule dans le secteur grec et de faire les déplacements courants entre les casernes Wolseley et le CCB. La Garde nationale a établi des points de contrôle partout et comme le coup d’état a tendance à stagner, les irréguliers aux cheveux longs deviennent un peu fous et irrationnels. Partout, des membres du EOKA B se promènent en voiture, une AK47 placée dans les fenêtres. Le nouveau régime a peu de respect pour les Nations Unies et nos soldats se font continuellement braquer une arme chargée en plein visage aux divers barrages routiers.

Le coup d’état en soi a été orchestré de façon militaire classique et bien mené, sauf pour l'évasion de Makarios. Tel que mentionné, la surprise fût totale et, en 20 minutes des premiers tirs, les chars étaient au centre-ville et attaquant les cibles traditionnelles pour prendre le contrôle militaire. À midi, les gouvernements de Nicosie et de Chypre sont complètement dominés. Un couvre-feu et l'utilisation de barrages routiers, et facilité; sans aucun doute, par le tir aveugle de mitrailleuses de calibre 0,50, ont rapidement maîtrisé la population. Le lendemain, la police chypriote grecque montre une fois de plus qu'elle est efficace en convaincant la population de rendre toutes les armes illégales aux stations de police.

Les aspects politiques du coup d’état, bien que fascinants, sont trop complexes pour être analysés dans le présent récit. En fait, certains pourraient dire qu'ils sont tout simplement trop complexes pour se prêter à quelque analyse que ce soit.

 

L'INTERVENTION TURQUE À CHYPRE

PHASE 1

La force d'intervention turque à Mersin Turquie du sud, fut placée sur un pied d'alerte le 17 juillet 1974. Pour la Turquie, les implications du coup d’état à Chypre, sous l'égide du gouvernement de Nicos Sampson, étaient évidentes; les préparatifs pour la sauvegarde des droits de la minorité chypriote turque furent entrepris. L'imminence d'une attaque apparut par la poursuite des préparatifs entrepris par les forces d'intervention et le groupement des transports maritimes dans le secteur de Mersin.

Le 20 juillet, à 0320 hrs, le chef d'état-major au QG UNFICYP, le brigadier F.R. Henn (britannique) appela le QG du District de Nicosie et demanda de s'entretenir avec le commandant. Les nouvelles furent surprenantes; le brigadier avait reçu l'information que des "visiteurs" venaient du nord, le contingent devrait être prêt pour toute éventualité. À 0330 hrs, le commandant donna les directives à la compagnie d'observation:

1. S'assurer que tous les postes d'observation soient immédiatement doublés, et ce même après le lever du jour;

2. Le poste d'observation «Golf Course» sera double en permanence;

3. Le chef de peloton responsable du moulin demeurera sur les lieux dans le but d'observer toute activités venant du nord et dans le secteur du contingent national à Orta Keuy;

4. Tous les postes d'observation seront visités et le personnel sera informé de l'importance de faire rapport immédiat des activités dans leur secteur de responsabilité;

5. Les véhicules administratifs ne se déplaceront pas à moins d'une absolue nécessité.

Afin de maintenir une liaison étroite avec les factions, des officiers de liaisons (OLs) furent nommés aux QG des Districts adjacents, nommément le QG (FINCON), 3 Higher Tactical Command (3 HTC), et le «Turkish Cypriot Leadership». À 0606 hrs, l'OL au 3 HTC fut renvoyé au Centre des opérations combinées (COC).

L'invasion turque commença tôt le 20 juillet; un avion à réaction attaqua deux canonnières chypriote grecques près de «Snake Island», située à3 kilomètres à l'ouest de Kyrenia. Après une suite d'attaques aériennes sur des objectifs militaires à Nicosie et Kyrenia, vint le parachutage des troupes dans la plaine à proximité nord de Nicosie.

Au cours de la journée, des opérations de débarquement et de parachutage de troupes eurent lieu dans le but d'établir un corridor de l'enclave Nicosie-Kyrenia à la mer. Des combats éclatèrent à travers l'île et les unités de la Garde nationale encerclèrent les enclaves et les centres Chypriotes turcs.

Les Chypriotes turcs, craignant que leurs quartiers de Nicosie ne soit pas proprement identifiés par les pilotes, dép1oyèrent des banderoles rouges sur les édifices et devant leurs fenêtres; on ne rapporta aucun tir aérien qui aurait pu atteindre ces résidences. À 0508 hrs, la majorité des PO le long de la Ligne verte fit rapport de tirs épars ainsi qu'un rassemblement de troupes et d'armes d'appuis. Ce tir épars se déchaîna pour devenir par la suite une bataille en règle. Les postes d'observations, qui maintenant situés entre deux feux nourris, devinrent vulnérables étant donné que les guérites n'offraient aucune protection contre le tir des armes légères. À ce moment, le premier poste d'observation à être évacué fut celui du «Golf Course»; dès 0550 hrs les combattants Chypriotes turcs le prirent d'assaut, mais le personnel qui l'occupait purent l'évacuer sans incidents. Ce fut le premier poste des NU à être repeint rouge.

Le premier parachutage de troupes survint à 0604 hrs, dans la plaine juste au nord du camp occupé par le Contingent national. Quelques 1,000 personnes furent parachutées des avions C-130 Hercules, OC-3 et C-160 Transall. L'opération se poursuivit toute la matinée et dès 1200 hrs on comptait déjà sept vagues de parachutage et trois débarquements héliportés pour enfin placer la brigade aéroportée sur la plaine à Nicosie. Ils n'apparurent point s'attaquer aux positions avancées des Chypriotes grecques; ils effectuèrent la jonction avec les troupes Chypriotes turques (TCF).

Le radio Bayrak, la voix des TCF,annonça que le débarquement ne devait pas être considéré comme une intervention militaire, mais bien comme une action purement policière, la radio ajoutait que les Chypriotes grecs devraient demeurer à leur foyer! La réaction de la radio Chypriote grecque fut d'annoncer la mobilisation générale, la réquisition des véhicules et l'incitation à se battre sans trêve car le débarquement turc tel qu'annoncé n'était que du bluff. Le message spécial se termina en mentionnant, «Longue vie à Chypre libre» et les ondes se remplirent d'une suite de musique militaire marquée par un choix plutôt ennuyeux et restreint.

À 0652. hrs, le Commandant donna l'ordre à la compagnie d'observation de retirer le personnel se trouvant dans l'arc de tir des factions. Ces dernières auraient semblées avoir lâché au petit bonheur quelques coups vers les postes des NU. Les soldats de la Garde nationale augmentèrent les risques en faisant feu sur tout ce qui survolait le secteur les hélicoptères des NU inclus. L'officier commandant la Compagnie d'observation, le major K.C. Eyre rapporta au commandant la situation des divers postes d'observations: Hermes II et Constantine, déplacés au «Beaver Lodge» (QG de peloton); Paphos Gate, déplacé au Roccas Bastion; Golf Course, évacué; Paphos II, en position; Chimo, en position; Red Line III, en position; Flour Mill, en position.

Durant cette première journée, les postes d'observations devaient être successivement évacués à cause du feu croisé et des tirs directs. Certaines évacuations impliquèrent la retraite devant les lignes même des TCF, en plein quartier résidentiel turc. À compter de 0740 hrs le 21 juillet, seul le poste d'observation «Flour Mill» était occupé; c'était le seul doté d'un arc de vision pouvant répondre aux besoins de l'heure.

À Nicosie, l'officier en service du District de Nicosie (Contingent canadien) enregistrait les rapports sur Ies activités des turcs et des Chypriotes grecs - on n'aurait pu mieux comparer cette situation à un film de guerre. Toutefois, tout semblait calme au COC si ce n'eut été ce sentiment d'attente avec impatience suspendu au-dessus des têtes.

Outre assurer la sauvegarde de ses troupes, les NU devaient en plus essayer de négocier un cessez-le-feu local; l'une ou l'autre des factions ne pouvait se décider à arrêter les premiers. Il était important pour les OL de relayer et de recevoir rapidement les directives ayant trait aux contacts. Le commandant situé au VPO (Turkish Cypriot Vice Président's Office), relaya les directives suivantes au COC du District de Nicosie: les TCF ont ordre de ne pas tirer dans le secteur chypriote turc et le commandement désire des exemples précis de tel tir; certifiez que nous (District de Nicosie) avons des LO dans les compagnies TCF et le 3 HTC afin d'appliquer et contrôler la politique du cessez-le-feu; les troupes nationales turques ont l'intention de tenir dans l'enclave afin de protéger les chypriotes turcs.

Les efforts pour déployer les OL aux compagnies des TCF furent en quelques sortes difficiles; ainsi à la 2e Compagnie (le long de la Ligne verte), l'OL fut désarmé et fouillé pour ensuite recevoir l'ordre de quitter le secteur. Le QG 3 HTC révéla à l'OL des NU que tout cessez-le-feu doit passer par le QG de la Garde nationale. Le 3 HTC était aussi réticent à évacuer ses troupes du Ledra, lequel à ce moment comptait 380 personnes nommément un groupe de la presse internationale de plus de 100 personnes. Le Palais devait être témoin d'incidents majeurs au cours du combat. À 0855 heures, l'adjoint, le major G.C. Lewis, se rendit au Palais dans le but d'enquêter sur les tirs. Il parvint à convaincre les soldats de la Garde nationale et demanda au commandement d'intervenir auprès des TCF sur le même motif. Après une courte pause, les tirs recommencèrent.

Les OL reçurent l'ordre d'informer leurs unités pour la mise en vigueur d'un cessez-le-feu à 1000 heures; ce fut impossible.

La Garde nationale tirait au mortier dans l'enclave turque et certaines positions de tir étaient proches des secteurs des NU. Par conséquent toute contre-offensive des TCF ou de l'armée turque pourrait affecter les NU. À tous les échelons, les soldats canadiens essayèrent de localiser ces positions et de convaincre la Garde nationale de se déplacer. Il était plus qu'évident que la Garde nationale se servait des NU en guise de bouclier étant donné que les deux factions connaissaient parfaitement les secteurs occupés par les NU. La situation semblait se répéter à l'aéroport international de Nicosie et au camp Béret bleu (BBC); les unités de l'artillerie et anti-aériennes de la Garde nationale se déployèrent dans un ravin situé au sud de BBC et du camp Kykko (QG FINCON). Ainsi, l'OL du CANCON situé à Kykko pouvait voir la position de la batterie 100 mm de la Garde nationale au sud et l'éclatement des obus dans l'enclave turque située à 6,000 m plus au nord à Guenyli. Les bombes de mortier turques commencèrent à se rapprocher dangereusement du BBC à cause des tirs trop longs, ils avaient dépassé la route de l'aéroport. De plus les avions de combat F-100, après avoir lâché leurs bombes, roquettes et le napalm sur le camp du Contingent national grec et l'aéroport, avaient commencé à repérer les batteries de l'artillerie de la Garde nationale vers la fin de la journée. Il fut demandé au commandant local de déplacer ses batteries, mais ce fut sans succès.

Entretemps, à Louroujina, à 14 milles au sud-est de Nicosie, la section des NU se demandait ce qui se passait dans la ville; à leur tour, ils eurent leurs problèmes. Les TCF, ayant le contrôle entier de la ville, avaient mis à bas tous les drapeaux des NU et occupé les postes d'observation. La section ne fut dérangée en aucune sorte. Le commandant décida de les laisser en location.

L'hôtel Ledra Palace dominait la Ligne verte et le quartier résidentiel turc, c'est pourquoi la Garde nationale grecque tirait avantage de ses positions de feu. Les soldats chypriotes turcs faisaient tout en leur pouvoir pour neutraliser l'hôtel; ce dernier offrait une protubérance au sein de la Ligne verte, il était constamment assailli par le feu des armes légères, 50 mm, mortiers et les armes anti-chars. La quatrième façade était balayée par un tir de flanc. Le fait qu'aucun civil ne fut blesse relève du miracle. Il fut constamment répété aux deux clans que l'hôtel abritait des civils, femmes et enfants inclus. À 1202 hrs, le commandant réunit un petit groupe de quelques 12 personnes dans le but de vérifier la situation au Palais, et s'il y avait lieu, d'évacuer les femmes et les enfants blessés. Au moment ou ils s'apprêtaient à quitter le COC, une nouvelle vague d'armes légères et le feu de mortier dispersa le groupe. Après des négociations auprès du commandement et du QG de la Garde nationale un cessez-le-feu local fut consenti afin de permettre l'évacuation des civils. Cette tâche se termina à 1435 hrs le lendemain. Les civils y demeurèrent.

À 1224 hrs, trois obus de mortier (60 mm) éclatèrent dans le camp appelé Wolseley Barracks; un dans le magasin des transmissions, le deuxième dans le bureau de la compagnie du QG et le dernier dans le parc des véhicules. Le dernier obus fut la cause des cinq premiers blessés du CANCON; les blessures furent causées par les éclats.

Entretemps, les secteurs avaient été coupés d'électricité et d'eau, et le générateur de secours vint en aide pour remettre en marche les facilités au COC. Toutefois le pouvoir ne suffisait pas à faire fonctionner l'air conditionné et l'on dut continuer d'opérer sous une température de plus de 90 degré F. C'était un vrai sauna au CANCON! Les aliments commencèrent à se détériorer étant donné que le système de réfrigération ne fonctionnait plus.

Une fois de plus les deux factions consentirent à respecter un cessez-le-feu commençant à 1400 heures. À l'exception des banlieue de Neapolis et Trakhones qui avaient été prises par les turcs, il n'y avait que très peu de déplacement dans la ville même. M. Hassan, l'OL politique au VPO n'avait pas été informé du cessez-le-feu. Ce dernier fut violé a 1410 heures lorsque les avions jets turcs revinrent bombarder des cibles pré-déterminées dans la ville.

Le sixième blessé du CANCON survint à 1507 hrs lorsque le soldat Lévesque fut atteint à son poste près du mess des officiers à Wolseley Barracks. Le blessé fut évacué au BBC sous escorte par des véhicules de patrouille ferret appartenant à l'escadron parachutiste du Royal Armoured Corps; à ce moment cette troupe était sous le commandement du District de Nicosie.

Plusieurs à UNFICYP et au sein de la Garde nationale, crurent au tout début que les Forces turques (aéroportée et commando) portaient le béret bleu et faisaient flotter le drapeau des NU dans le but d'apporter la confusion chez les Chypriotes grecs. Chose surprenante, il est normal que ces troupes turques portent le Béret bleu. Encore plus évident, il fut observé que certains membres de la Garde nationale portaient le Béret des NU. De plus, les troupes TCF portèrent par la suite l'uniforme de combat canadien des NU, incluant les bottes de jungle, au fur et à mesure que les secteurs des quartiers turcs étaient pillés. Les contrats de blanchissage se trouvaient dans ce secteur. À 1559 hrs, les Canadiens eurent leur septième blessé en la personne du soldat Gasse; ce dernier reçut une balle à la jambe alors qu'il conduisait son véhicule à proximité de la Ligne verte dans le secteur de Maple Leaf Manor, résidence du peloton de reconnaissance. Son évacuation n'eut lieu qu'après avoir établi un cessez-le-feu local; à 1630 hrs il fut transporté au BBC. Quelques coups de feu furent tirés en direction de l'ambulance sans cause de dommages. Un autre cessez-le-feu fut organisé localement pour 1700 hrs mais les factions prétendirent ne pas être en position d'arrêter leur tir sans avoir reçu l'ordre de leur propre QG. Afin d'ajouter à la confusion, le 3 HTC allégua que la Garde nationale avait des directives fermes de ne pas faire feu ou de retourner le feu.

L'hôtel Ledra Palace se mit une fois de plus en évidence vers 1630 hrs lorsque le commandant et un groupe de dix hommes retournèrent à l'hôtel afin de mieux évaluer la situation et d'essayer de placer le secteur sous la juridiction des NU. La Garde nationale refusa de quitter les lieux et les journalistes qui y demeuraient encore continuaient de rapporter sur la situation; l'hôtel était coupé.

LA DEUXIÈME JOURNÉE

La situation dans la ville devint plus détendue au cours de la nuit du 20 au 21 juillet. Des tirs venaient encore des postes le long de la Ligne verte et de l'hôtel Ledra Palace. À 0320 hrs, la section de Louroujina fit rapport qu'un drapeau des NU avait été remis et qu'ils pouvaient se déplacer avec plus de liberté dans la ville.

À 0417 hrs un rapport annonçait Ie huitième blessé du Contingent en la personne du lieutenant R. McGrath de la cie d'observation. Il était alors Ol des NU auprès de la 22e compagnie, TCF, lorsqu'il fut atteint au bras par une balle durant une séance d'observation. L'hôpital turque lui donna les soins requis; il pu par la suite rejoindre son unité.

La première attaque au mortier de la journée dans le secteur de Wolseley Barracks survint à 0450 hrs avec quatre bombes; deux bombes atteignirent le Ledra Palace et les deux autres éclatèrent sur le terrain de sport. Il n'y eut aucun blessé. Toutefois, une heure et demi plus tard, les bombardements et le tir des armes légères recommença dans le secteur du Palais; les civils commençaient à être pris de panique et le sergent du peloton de reco qui se trouvait dans l'hôtel essaya de les calmer et les fit descendre au sous-sol. Ce dernier s'efforça d'arrêter les soldats de la Garde nationale de tirer; ils étaient aussi nerveux que les civils.

Tôt le matin la cie d'observation était occupée à évacuer les civils de certains endroits de la ville au secteur du Haute-commissaire britannique qui se trouvait en milieu diplomatique. Sans incident, à 0805 hrs, les évacuations avaient été complétées et quelques 50 civils pouvaient une fois de plus remercier les canadiens de les avoir tiré d'une mauvaise posture.

Le compte des blessés se chiffre à neuf lorsque le soldat Simard (451) fut atteint au coude lorsqu'il était en train de combattre un incendie. Le coup de feu semblait provenir du secteur turc.

Au milieu de la matinée la situation devint plus tendue à l'hôtel Ledra Palace. L'eau et les vivres étaient rationnés, les dommages à la bâtisse étaient élevés, et les civils désiraient quitter l'hôtel. Quelques journalistes avaient déjà quitté les lieux. Le peloton de la Garde nationale, au nombre de 40, refusa de quitter l'hôtel, les soldats devenaient de plus en plus menaçants. Des plans furent mis en marche afin d'évacuer les civils du Hilton. Un obstacle sérieux se présenta lorsque les soldats dans l'hôtel verrouillèrent les portes et s'opposèrent au départ des civils. On pensa immédiatement qu'il s'agissait d'une mesure prise pour obtenir des otages. Tout revint à la normale lorsque le chef du peloton grec, un petit homme très nerveux muni d'une AK-47, reçut l'ordre par le 3 HTC de libérer les civils. Le Haut-commissaire britannique de par son poste prit part aux négociations avec le Ministère de l'intérieur chypriote. Les ambassades eurent comme tâche de s'assurer du sort de leurs citoyens. À 1435 hrs, un convoi de 54 camions britanniques, un autobus, deux mini-autobus et dix autos civiles fit route vers l'hôtel Ledra Palace; on évacua tous les civils de l'hôtel. Il fallait de plus convaincre la Garde nationale de quitter les lieux afin de déclarer l'hôtel sous la tutelle des NU. Les négociations au 3 HTC étaient dans une impasse jusqu'à 1600 hrs; l'OL, le capt I.A. Nicol informa qu'ils avaient soudainement changé d'avis, mais il fallait que l'hôtel soit occupé immédiatement par les NU. Cette dernière décision vint tout à fait par surprise, considérant le fait que le sgt Dicaire et son groupe étaient là pendant 18 hrs. Un cessez-le-feu local fut appelé afin de permettre aux soldats chypriotes de quitter les lieux. À 1645 hrs, le QG UNFICYP fut informé que l'hôtel Ledra Palace était occupé par les NU. Le commandant du peloton grec insista que ses ordres étaient de demeurer sur les lieux et que les turcs (TCF) devaient cesser les combats. L'OL au 3 HTC et un interprète chypriote vinrent afin de clarifier les ordres reçus par le capitaine. Le capitaine rallia son peloton de 40 hommes et insista qu'il ne quittera pas les lieux si les turcs commençaient à tirer. Le commandant lui proposa de descendre sur la route avec lui. Comme les chypriotes commencèrent à évacuer l’hôtel, l'OL au VPO informa le COC de l'imminence d'une attaque aérienne turque sur le Ledra Palace. À 1758 hrs tous, sauf la section de reco qui était demeurée au sous-sol, avaient quitté les lieux. Le VPO déclara qu'il leur était impossible d'arrêter l'attaque aérienne étant donnée qu'elle était dirigée d'Ankara. M. Hassan était aussi préoccupé par cet état de chose car le VPO se trouvait dans le secteur de tir; il en était de même pour Wolseley Barracks! Au moment où le commandant s'apprêtait à préparer les plans pour l'évacuation de 1a section, le It Leblanc qui se trouvait sur un bastion turc au côté opposé de l'hôtel fit rapport que le FAC était dans son secteur et que rien ne pouvait être entrepris à ce niveau pour enrayer l'attaque. La section de reco reçut l'ordre de se regrouper à la porte sud de l’hôtel; entretemps, le capt Forand avec deux véhicules ferrets, fut dépêché au terrain de stationnement dans le but d'évacuer la section. Le groupe fit aussitôt marche arrière vers Wolseley Barracks et quelques instants après deux avions de combat firent une passe sur le Ledra, l'un lâcha une rafale de 20 mm qui n'atteignit pas son objectif. L’hôtel Ledra Palace fut réoccupé par les NU après le départ des avions.

Vers la même heure le VPO fit rapport que l'aviation turque s'apprêtait à attaquer l'hôpital de Nicosie étant donné que l'artillerie antiaérienne de la Garde nationale se trouvait sur le toit de l'édifice. Assurément, il y avait deux armes de calibre .50, et les NU purent convaincre la Garde nationale de les enlever et l'attaque fut ainsi évitée. Au même moment la cie logistique fut témoin de la seule attaque des Starfighters F104. Il fut constaté que les pilotes des F104 furent plus habiles que ceux des F100. L'excitement de l'attaque était causé par leurs vols à basse altitude effectués avec une grande vitesse et dextérité. Avant l'attaque, les pilotes larguèrent leurs réserves et quelques unes atterrirent sur le BBC.

La journée se poursuivit sans incidents et le commandant profita de cette pause pour donner les ordres d'évacuation de BBC et Kronberg en cas de danger trop grand. La deuxième journée se terminait et les forces turques n'avaient pas avancées, mais le corridor débouchant à la mer avait été établi.

LA TROISIÈME JOURNÉE - 22 JUILLET

L'événement important des premières heures de cette journée fut une tentative de débarquement aéroporté fait par des avions de transport Nord-Atlas grecs. Dès 0130 hrs, le vrombissement de ces avions était entendu, et plusieurs croyèrent que c'était l'aviation turque qui revenait pour une mission de bombardement nocturne. Incidemment, un équipage de mitrailleurs chypriotes grecs à l'aéroport fit feu sur l'un des leurs causant ainsi un écrasement. Un autre avion fit un atterrissage forcé et s'arrêta dans deux autres avions déjà stationnaires au sol. Plus lard il fut estimé qu'environ 200 commandos grecs avaient mis pied sur l'île.

Tout au long de la nuit, les deux factions augmentèrent leurs effectifs dans les positions avancées. À 0326 hrs, le QG des NU suggéra un cessez-le-feu dans la ville commençant à 0500 hrs. Le VPO déclara que de tels termes relevaient d'Ankara; la décision pourrait se faire attendre.

On a cru que tout était redevenu dans I’ordre lorsque George, le garçon de table travaillant au mess des officiers, se présenta comme à l'accoutumée. À sa grande déception il apprit que la cuisine ne sera pas ouverte avant quelques jours.

À une occasion il fut décidé de retirer la section à Louroujina pour que la Garde nationale attaque la ville. Deux véhicules scouts furent envoyés dans le but de ramener la section à Nicosie. Entretemps, la situation parut assez stable afin de permettre de les laisser sur les lieux. Ceci fut transmis au commandant de la Force qui ajouta: «Continuez le bon travail; prenez possession du Ledra Palace et hissez le drapeau.» Les véhicules ferrets demeurèrent sous commandement, et outre les tâches d'escorte, ils maintinrent la présence des NU sur la Ligne verte par des patrouilles.

À 1140 hrs la cie du QG qui s'était retranchée au BBC et à Kronberg reçut l'ordre de retourner à Wolseley Barracks - la guerre de papier devait aussi se poursuivre!

Les NU initièrent un cessez-le-feu effectif à 1600 hrs, les parties se mirent d'accord après les délais habituels. Les véhicules ferrets patrouillant la Ligne verte furent retenus par les TCF sous prétexte qu'il n'y avait plus de Ligne verte. Une heure et quinze minutes plus tard, les véhicules ferrets purent se soustraire. Le rythme du tir des mortiers et des armes légères continua sans interruptions surtout dans le secteur du camp Kronberg (QG de la compagnie d'observation). À 2006 hrs le commandant ordonna à la compagnie de s'assurer que tout le personnel était sous couvert; préparer le repli en s'assurant d'apporter le matériel militaire requis; faire un plan détaillé du repli; d'aviser lorsque la cie sera à 60 minutes d'avis pour quitter les lieux. À 2045 hrs, la situation s'était beaucoup améliorée. Avec la tombée de la nuit les combats cessèrent; ce rythme de combat devenait ainsi familier.

PÉRIODE DU 23 JUILLET AU 12 AOÛT

La période du cessez-le-feu fut l'occasion pour la Garde nationale de regrouper ses éléments tandis que les turcs s'appropriaient plus de terrain; ils étendaient leur enclave et/ou leurs secteurs.

À midi, de durs combats s'engagèrent dans le secteur du camp Kronberg. Ces combats occasionnèrent des déplacements de la part des soldats turcs et des chypriotes grecs; à un moment, l'asile dans le camp fut demandé par les hommes des deux groupes. Ce fut ce qui occasionna au CANCON d'enregistrer son blessé le plus grave en la personne du capt Blaquière; ce dernier fut blessé lorsqu'il s'efforça d'escorter des soldats du TCF en sécurité à l'extérieur de Kronberg. L'opération de sauvetage du capt Blaquière et du sdt Plouffe (une balle pénétra au travers de sa joue, il la cracha dans sa main) fut menée par le capt A. Forand, commandant du peloton de reco; ce dernier donna l'ordre à un véhicule ferret et à une mitrailleuse .50 d'ouvrir le feu sur une position de la Garde nationale qui tirait sur les canadiens. En tout, 400 balles de calibre .50 et 200 balles de calibre .30 furent employées et deux soldats semblèrent avoir été tués. Le commandant local de la Garde nationale avait été averti au préalable.

Un autre incident survint mais le CANCON n'en fut informé que le lendemain. À cause de l'importance tactique de l'aéroporté de Nicosie et la crainte que les grecs essaient un autre débarquement aéroporté, l'armée turque décida de s'emparer de l'aéroport. UNFICYP décida qu'il fallait intervenir en haut lieu et négocia pour enlever l'aéroport à la Garde nationale. À ce stage, l'adjoint à UNFICYP, le colonel C.E. Beattie joua un rôle important par son intervention entre les deux groupes sur la route de Morphou. le District de Nicosie fut chargé de prendre charge des facilités de l'aéroport et le Lcol Manuel déploya le deuxième peloton de la cie d'observation et la cie logistique; la force était sous le commandement du maj D. Harries. Quelques heures plus tard, craignant peut-être l'imminence d'une attaque de l'armée turque, UNFIYCP donna l'ordre au Lcol Manuel de prendre personnellement le commandement de la force de défense de l'aéroport et du camp UNFICYP. Son terme ne dura qu'une nuit; les responsabilités revinrent au maj Harries qui fut à son tour relevé par les 16/5e Lanciers équipés de ferrets de type Saladins et Vigilant.

Outre le peloton d'infanterie attaché à la cie d'observation l'aéroport était surveillé par des commis, des mécaniciens, des chauffeurs et des cuisiniers appartenant à la cie logistique. On avait réussi à trouver des hommes pouvant manier les mitrailleuses et les canons antichars 106 mm. Si les turcs avaient attaqué, le groupe du maj Harries n'aurait peut-être pas eu la suprématie du feu. Mais, il était toutefois évident que les gars étaient prêt à demeurer en position pour se battre jusqu'au bout. Ils étaient prêt à tirer si le périmètre de l'aéroport était violé par les turcs.

Le lendemain (24 juillet), la situation devint stable et le QG du District de Nicosie fit le nécessaire pour connaître les limites de la nouvelle Ligne verte. La cie d'observation reçut l'ordre d'approcher le centre de la vieille cité du sud et de déployer les pelotons à l'extérieur du mur. Le maj Eyre commanda cette opération, il avait trois pelotons et le support de quatre véhicules ferrets. Il était évident que ce fut toute une expérience de marcher entre deux factions qui s'étaient combattues pendant trois jours. Certaines difficultés furent rencontrées venant des deux factions et plusieurs bombes et grenades gisaient au sol non explosées; à la tombée de la nuit, la Ligne verte nous appartenait encore. Le lendemain les postes d'observations étaient rétablis.

L'autre phase de l'opération fut commandée par le capt Forand, commandant du peloton de reco, et consistait à vérifier, à l'aide de patrouilles, la nouvelle ligne au nord de la ville. Ces patrouilles n'étaient pas sans incidents, car les jeeps encore peinturés vert kaki devaient de temps à autres s'aventurer dans les lignes grecques et turques. Les soldats de l'armée turque voyaient pour la première fois opérer les soldats des NU; certains d'entre eux n'étaient pas au courant de la présence des NU à Chypre. L'opération se poursuivit sans blessés et le District de Nicosie put faire le tracé de la nouvelle Ligne.

Le cessez-le-feu fut officiellement ratifié à Genève, et un comité fut formé afin de délimiter la position exacte des groupes sur le terrain. Ce comité était composé des aviseurs militaires dont le col C.E. Beattie de UNFICYP, le col J. Hunter représentant britannique, le haut-commissaire britannique, la Turquie, le col Chakar, et le maj Tsolaskis de la Grèce. Le comité fit parvenir ses recommandations à Genève pour la conférence de paix qui aboutit par un ultimatum turc le 13 août (ils réclamaient plus de terrain). Le lendemain, 14 août, les forces turques commencèrent la deuxième phase des combats à Chypre.

LE RÉGIMENT EST RÉUNI

Les unités divisées en deux lors du déploiement de la majeure partie du régiment à Chypre fin juillet et début d'août 1974 sont rassemblées. Le régiment est composé: la 1re Batterie aéroportée, le 1er Escadron Génie de campagne aéroporté, le Quartier général et l'Escadron des transmissions du Régiment aéroporté, le 1er Cdo, le 2e Cdo, la 1re Unité de soutien aéroportée et une troupe de reco du LdSH(RC). Le régiment est déployé à Chypre avec toutes ses attributions au TDFCC (tableau de dotation en matériel des FC en campagne), y compris son matériel de premier échelon, et une réserve de munitions pour sept jours, sans oublier les TTB M-113 et les véhicules de reconnaissance Lynx envoyés à Chypre d'Allemagne.

Le régiment arrive avec tous les «outils» nécessaires pour remplir sa mission sous l'égide des Nations Unies, assurer la sécurité de son propre personnel, et protéger les soldats canadiens chargés d'assurer le maintien de la paix contre toute attaque de la part des belligérants. Le contingent canadien devait se faire des "dents". Il ne devait plus vivre de situations où il était complètement désarmé ou ignoré. Ce point est bien compris lorsque, à plus d'une occasion, les barrages routiers établis par l'armée turque, les forces chypriotes turques (FCT) et les unités de la Garde nationale grecque sont enlevés de force par nos soldats. Dans des secteurs très spécifiques, il nous faut défendre notre liberté de mouvement; les deux camps ont appris à nous respecter sur ce point.

Le 2 août, le commandant assume 1e commandement et déploie graduellement le Régiment en fonction de l'arrivée du personnel, des véhicules et du matériel et des tâches assignées par le QG FNUC. D'autres PO sont établis et la zone inoccupée est rigoureusement patrouillée. Les soldats canadiens ressentent une grande fierté; ils sont plus confiants et le démontrent. Ça fait du bien de voir le Régiment réuni.

LA SECONDE OFFENSIVE TURQUE

Alors que le Régiment s'installe dans son nouveau milieu et reçoit du matériel et des équipements additionnels par avion, l'armée turque en fait autant. D'autres unités, pièces et chars sont débarques sur la côte nord près de Kyrenia. Ces activités pavent la voie à la seconde phase de l'opération turque. De la petite enclave turque, qui s'est considérablement élargie lors de l'invasion de l'île, l'armée turque pousse vers l'est et l'ouest pour s'approprier plus du tiers de l'île, y compris les principaux ports.

Les préparatifs Canadiens sont troublés par un accident très regrettable. Dans la nuit du 6 août, une patrouille canadienne montée dans une jeep s'approche d'un barrage routier des FCT. Peu de temps après que l'officier ait stoppé la jeep et soit descendu pour parler à la sentinelle des FCT; des coups sont tirés et le chauffeur de la jeep, le para Perron est atteint de deux balles au dos; il succombe à ses blessures pendant son transport par hélicoptère à l'hôpital.

Le 13 août, vers 0020 hrs, les unités sont à faire les préparatifs en provision des hostilités lorsque le QG FNUC ordonne l'ALERTE ORANGE. Ceci suite aux rapports alarmistes de la conférence sur la paix tenue à Genève; on croit alors qu'une seconde phase des opérations est possible du côté des Forces de paix turques». Pendant ce temps, nos parachutistes remplissent des milliers de sacs de sable apportés du Canada pour la construction de tranchées et de casemates. Toute la journée du 13 août, on note la présence de véhicules turcs dans le secteur situé immédiatement au nord de la ville. Au crépuscule, on compte au moins 60 véhicules, dont trente-huit chars, dans la ville de Geunyeli. Pendant la soirée, on remarque une continuelle réorganisation.

Pendant la journée du 13 août, il y a quelques tirs sporadiques mais aucun échange de tirs soutenu n’est noté. La Garde nationale, pressentant une action, alerte ses troupes et des redéploiements sont notés.

À 1700 hrs, le commandant du régiment se rend au QG FNUC et reçoit un compte rendu de la situation. À son retour, il ordonne que tous les TTB et Lynx (véhicules de reconnaissance chenillés) se trouvant à l'atelier opérationnels pour 0600 hrs le lendemain. Il ordonne également que tous les véhicules chenillés soient peints en blanc afin d'éviter toute confusion avec les véhicules turcs.

À 2200 hrs, le col G.H.J. Lessard commandant du régiment, émet des ordres en vue d'une reprise imminente des hostilités. Ces ordres comprennent des plans d'urgence pour la réduction du personnel non essentiel dans le secteur des casernes Wolseley/l'hôtel Ledra Palace, si cela s'avérait nécessaire.

À 2257 hrs, toutes les lumières de la ville de Guenyeli sont éteintes, sans aucun doute pour prévenir l'observation et indiquer les emplacements chypriotes grecs, lesquels restent éclairés. À 2258 hrs, un appareil non identifié, avec feux de position, survole, à environ 10 000 pieds, la ligne de défense avancée de la ville. Il effectuait probablement une mission de reco, et, chose intéressante, il apparaît immédiatement après l'extinction des lumières de Guenyeli.

Le contingent canadien attend l'attaque turque qui semble maintenant imminente; l'attente est semblable aux moments qui précèdent le saut d'un parachutiste.

JOUR 1

Bien que les activités se poursuivent toute la nuit dans les deux camps, ce n'est pas avant 0430 hrs, le 14 août, que les camps belligérants occupent leurs tranchées avancées. À 0455 hrs, on entend des tirs d'artillerie au nord des montagnes de Kyrenia. On apprendra plus tard que c'était des tirs Turcs sur Karavas et Lapithos.

À peu près au même moment, où le sgt A.M. Gallant du 2e Cdo transmet, au sous-officier qui prend sa relève, les ordres émis plus tôt par le QG du Régiment, les appareils arrivent et l'attente se termine.

Le 14 août 1974, à 0500 hrs, les membres du contingent canadien à Chypre qui n'étaient pas encore levés et occupés au travail sont réveillés par le vrombissement d'avions à haute performance des «Forces de paix turque». Ces appareils, que l'on croit être des Phantom, lancent ce qui plus tard sera appelée la Seconde offensive turque sur l’île fortifiée de Chypre. Les appareils, par la suite identifiés comme des F-I00 Super Sabre, passent la majeure partie de la journée à bombarder et à mitrailler les positions de la Garde nationale autour de Nicosie. Ils ont été rapportés par le PO CORNARO au moment désigné, en formation de 10. C’était la plus imposante formation d’appareils turcs jamais vue pendant la première attaque de la seconde offensive.

Les soldats des Nations Unies affectés aux PO à la ligne de combat se rendent compte que les deux camps, dans leur hâte de s’affronter, ne font guère de cas de la neutralité des Nations Unies. Les rapports qui indiquent que les deux camps attaquent les PO se succèdent à un rythme effarant. À 0515 hrs, les PO des Nations Unies KLONDYKE, ROSSLYN et CORNARO sont la cible de tirs dirigés des turcs. Ceci en dépit du fait que l’officier de liaison turc ait été informé plus tôt de l’emplacement de tous les PO canadiens. Les postes restent occupés jusqu’à 0707 hrs, puis ils sont tous abandonnés, à l’exception du poste CORNARO qui l’est à 0812 hrs.

Ainsi débute deux événements d’une longue série, qui pour les personnes qui les ont vécus seraient à même de raconter de «vraies» histoires de guerre (si elles réussissait à retenir quelqu’un assez longtemps pour les écouter).

Le premier événement se déroule au PO PEGASUS, au nord-est de la ville. Ce poste se trouve à la toute extrémité du secteur d’opérations du 1er Cdo; en raison de son éloignement, un TT8 du 2e Cdo est dépêché la veille pour évacuer le personnel, au besoin. Lorsque le combat autour du poste se fait trop intense et que ses occupants sont de plus en plus exposés aux tirs, l’ordre d’évacuation est donné. Le TT8 reçoit plusieurs projectiles d'armes légères. Il se dirige au sud vers la zone bâtie, puis est endommagé par une explosion. Au moment de l'explosion, tous les volets sont fermés et seul le périscope permet de voir à l'extérieur. L'équipage est naturellement assommé par l'explosion provoquée, croyait-on, par une roquette antichar. Le TT8 est hors service et le chef de char qui s'attend à un second tir, ordonne l'abandon du véhicule. L'équipage descend et court en plein champ. Plus tard, il fût appris que la roquette antichar était une mine antichar et le champ, un champ de mines mixtes non marquées.

Le deuxième événement se déroule au PO CORNARO, un grand hôtel dans le secteur du 2e Cdo. Ce poste, en raison de la vue dominante qu'il offre, est considéré d'une importance suffisante pour être tenu le plus longtemps possible. À la merci des tir intense d'armes légères et de mitrailleuses en provenance des deux camps, ses occupants passent la majeure partie du temps à couvert et se hasarde sur le toît seulement lors d'une accalmie des tirs. Les Turcs passent ensuite du tir d'armes légères au tir de mortier, ce qui oblige les occupants du poste à se réfugier au sous-sol. Pour obtenir un rapport de situation dans le secteur, il faut monter six étages pour obtenir une position avantageuse. L'ascenseur est toujours en service, mais le service d'électricité de Chypre ne vit pas sa meilleure journée. À 0800 hrs, 11 chars turcs se trouvent à moins de 200 mètres du PO et l'ordre d'évacuation est donné. Cependant, vu l'intensité du combat, les déplacements en véhicules non blindés sont impossibles. On doit laisser les véhicules 1/4 et 3/4 de tonne au PO et le personnel doit se rendre à un point de rassemblement où un TTB les recueillera. Cette nuit là, à la fin des combats, une équipe spéciale va récupérer les véhicules abandonnés.

À peu près au même moment, deux TTB sont envoyés à l'hôtel Kennedy, dans la vieille ville, pour procéder à l'évacuation du personnel civil des Nations Unies. Une jolie secrétaire qui vient de monter dans le véhicule s'exclame alors: «Dieu merci, l'Armée américaine est là».

Entre-temps, dans les environs de l'aéroport et du camp des Bérets bleus, un combat qui durera trois jours, s'engage. Tôt le matin, des aéronefs ont tiré sur le camp du contingent de la Garde nationale, un autre camp abandonné appelé le camp 50 et le lycée.

À 0800 hrs, 220 à 300 mètres environ en face du PO CHARLIE, un coup de sifflet se fait entendre et une compagnie d'infanterie turque suivie de six chars avance en file étendue. Son objectif - le camp 50. Elle rencontre peu de résistance et avance lentement en subissant quelques pertes. Une fois l'objectif atteint, les chars demeurent sur place tandis que l'infanterie regagne sa position initiale. Ceci probablement, afin de protéger l'infanterie alors que le prochain objectif est frappé par les tirs aériens. Ce genre d'opération est répété de nombreuses fois les jours suivants.

Le premier blessé Canadiens de la seconde offensive survient à 0823 hrs, dans la cuisine du Ledra Palace. Ses blessures ne sont que légères, mais une fois de plus les Canadiens semblent se trouver dans une zone d'impact de mortier. Les tirs de mortier continuent à s'abattre sur le secteur général des casernes Wolseley, du Ledra Palace et du camp Kronberg le reste de la journée.

À 0900 hrs, un convoi de 20 véhicules sous le commandement du capt Wesko est formé aux casernes Wolseley pour évacuer le personnel non essentiel au camp des Béret bleus. Ce convoi est accompagné désigné par le commandant du régiment pour prendre en charge la base du contingent canadien au camp des Bérets bleus et coordonner les activités de défense locale de la base du contingent canadien.

À 1005 hrs, une légère vague de panique s'empare du QG FNUC à la nouvelle qu'un char turc arborant un drapeau des Nations Unies se trouve sur la route du mess des officiers de la RAF, à Nicosie. Puis, le char s'esquive; on se rend alors compte qu'il s'agissait d'un drapeau qui flottait à un mat en face duquel le char était stationné.

À 1006 hrs, le Centre des opérations interarmées du contingent canadien tente d'instaurer un cessez-le-feu local pour 1100 hrs. Le bureau du vice-président chypriote turc accepte immédiatement, mais le QG de la Garde nationale grecque n'est prêt à consentir que si «les Turcs l'acceptent et les Nations Unies garantissent que les Turcs ne profiteront pas du cessez-le-feu pour avancer la position de leurs forces». Enfin, un cessez-le-feu ensuite décrété dans la ville, en fonction d'un point est et ouest limitant la zone et accepté par les deux camps.

Ce cessez-le-feu dure 24 minutes; des avions à réaction turcs répandent du napalm sur les positions grecques installées au lycée et sur le camp du contingent des nationaux grecs. À 1250 hrs, les forces turques essaient de nouveau de pénétrer dans la zone du lycée.

Un nouveau cessez-le-feu local est planifié pour 1300 hrs mais vu la lenteur des communications, il n'entre en vigueur qu'à 1330 hrs. Tout au long de l'après-midi, le cessez-le-feu est transgressé par des tirs sporadiques dans la ville. Dans le secteur du lycée, les deux camps se livrent un combat déchaîné. Ce lycée domine le terrain au sud de l'ancien camp du contingent des nationaux grecs et il a été le premier objectif des Turcs dans leur tentative pour isoler l'aéroport. Les attaques lancées le 14 août ont avorté en raison du manque de coopération entre l'infanterie, les blindés et l'artillerie, et de la forte résistance opposée par les soldats de la Garde nationale grecque au lycée. À 1655 hrs, les appareils turcs aspergent le secteur de napalm et larguent une bombe de 500 1ivres. Après un long et pénible après-midi, les Turcs regagnent les positions qu'ils occupaient avant l'opération. Le lycée n'a pas été pris.

En général, le calme règne dans les autres parties de l'île, à l'exception du secteur au nord de la nouvelle route de Famagusta, où au moins trois colonnes d'infanterie précédées de chars se dirigent en direction est, vers Famagusta. L'objectif de ces colonnes se précise alors que: le groupe du centre entoure Famagusta, le groupe de gauche s'empare de Bogaz et de Panhandle et le groupe de droite une ligne suivant généralement l'ancienne route de Famagusta.

Dans la soirée du 14 (à 1830 hrs) un calme relatif plane sur Nicosie, déchiré par quelques tirs sporadiques. Les combats continuent de faire rage toute la nuit dans le reste de l'île où le cessez-le-feu n'est pas en vigueur. Les déplacements sont importants sur la route de Kyrenia et vers l'est. Étrangement, peu de gens vont vers l'ouest; on s'attend à ce que les Turcs gagnent également Morfou. Le journal du Centre des opérations interarmées de cette journée-la compte plus de 30 pages dactylographiées.

JOUR 2

Le 15 août, à 0508 hrs, l'artillerie établit son premier barrage au nord-ouest du terrain de courses de Nicosie. Pendant ce temps, des combats locaux surgissent sur toute la ligne de défense avancée dans la ville; le bombardement de mortiers présente un autre risque pour les troupes des Nations Unies. Plus tard dans la matinée, la Garde nationale ouvre de nouveau le feu sur les véhicules des Nations Unies qui se trouvent dans la ville.

Vers 0700 hrs, les F-100 sont de retour sur l’île. Pendant toute la journée, ils attaquent, à intervalles éloignés, le camp du contingent des nationaux grecs, le lycée et d'autres points dans toute la ville.

Pendant la journée, bon nombre de réfugiés se dirigent vers le sud, à l'extérieur de la ville. Ces réfugiés constitueront plus tard un des principaux problème du contingent canadien et des FNUC: des milliers de personnes délogées campent sous les arbres des Troodos et dans les nombreux villages au sud.

Le camp finlandais à Kykko (près du CBB) est la cible de tirs de mortier lourd et de d'artillerie lors des combats qui se déroulent près du lycée et de l'aéroport. Comptant environ 10 blessés, le QG FNUC décide de faire évacuer le camp et cette tâche est confiée aux Canadiens. La compagnie du 2e Cdo dirigée par le capt Bragdon, équipée de TTB, effectue l'évacuation sous les «auspices» des appareils turcs qui les aspergent de napalm. D'après la troupe du capt Bragdon, les Finlandais étaient réticents à quitter leurs tranchées et à monter dans les TTB. Fait très compréhensible, tout comme l'humeur du capt Bragdon qui ne voulait pas rester une minute de plus que nécessaire désirant faire sortir sa colonne de TTB du secteur.

Dans l'espoir de récupérer le TTB endommagé à une chenille par le «canon antichar, turc» , le commandant du régiment envoie une équipe dans la nuit du 14 août. Cette même nuit, la troupe de reco blindé du LdSH(RC) reçoit un ordre d'avertissement et prend les arrangements nécessaires pour effectuer la récupération.

La mission est confirmée dans la matinée du 15 août et un groupe mécanisé équipé de deux Lynx, d'un TTB de dépannage et d'un TTB avec infanterie d'appui est envoyé sur les lieux. Comme le Lynx de tête s'approche du TTB en panne, une forte explosion se produit du côté avant droit du véhicule, qui est soulevé du sol, fait une embardée à droite puis s’arrête. Une épaisse fumée noire et de la poussière brouillent la vision. L'équipage a été projeté à l'intérieur mais n'a subi aucune blessure grave.

Le chef de char, le It Ross, tourne la coupole; mais il ne voit aucune cible. Une fois le calme revenu, et qu'aucune autre action hostile survient, on inspecte l'extérieur du véhicule: la chenille droite est extrêmement endommagé. Un grand cratère à proximité révèle que le véhicule se trouve dans un champ de mines non marqué. Il y a maintenant deux véhicules à récupérer.

Ignorant alors les intentions des Turcs en ce qui concerne le secteur, nous avons élaboré un plan à quatre phases. L'adjum Witt trace un chemin jusqu'au premier TTB en panne afin d'aller constater les dommages. De son côté, l'équipage du Lynx débloque la chenille endommagée et le deuxième Lynx se rend à l'extrémité supposée du champ de mines et tente de trouver une Voie plus sûre pour récupérer le véhicule en panne. L'opération est finalement réussie sans autre incident.

On essaie à deux reprises de récupérer le Lynx. La première fois, le Lynx fait une embardée et provoque l'explosion de deux autres mines. La chenille gauche et la barre sont touchées, ce qui endommage davantage le côté avant droit. La deuxième tentative est la bonne, et les deux véhicules sont ramenés au camp des Bérets bleus. Le lt Ross, l'adjum Witt et l'adj McCarney ont accompli une mission très dangereuse et démontre beaucoup de savoir-faire. L'anticipation des sapeurs se concrétise. Cet incident montre bien que l'équipement apporté du Canada sera utilisé.

À 1300 hrs, on se rend compte que le camp Kronberg est une zone cible; les TTB du 2e Cdo reçoivent l'ordre de se mettre en attente en vue de l'évacuation des membres du 1er Cdo, qui occupent le secteur. En moins de trois minutes, quatre personnes sont blessées par un tir de mortier lourd. L'adjum D. Segin est le plus gravement blessé: il a reçu un gros éclat d'obus à la tempe. Vers 1308 hrs, tout le personnel du camp Kronberg est évacué, à l'exception d'une section.

Dans le cadre du déploiement du régiment au début d'août, le contingent canadien est chargé d'assumer la responsabilité de l'aéroport international de Nicosie; une Force d'intervention à l'aéroport est alors constituée; elle comprend la 1re Batterie aéroportée et le 1er Escadron de campagne aéroporté qui sont appuyés par des détachements de canon sans recul de 106 mm des 1er et 2e Cdos. En fait également partie une Swing Fire Troop (britannique) sous commandement et une équipe de contrôle aérien avancée pouvant compter sur 12 Phantom. le 15 août, le maj Harries, qui commande la Force d'intervention, signale du tir d'artillerie près de l'aéroport. Une batterie de la Garde nationale, au sud, tire au-dessus de l'aéroport sur les Turcs et quelques projectiles, probablement de vieilles munitions, tombent à court de l'objectif.

L'armée turque essaie à plusieurs reprises de pénétrer sur le périmètre de l'aéroport, un rayon de 500 mètres autour de l'aéroport, déterminé par le QG FNUC; les Turcs sont toutefois tenus à distance. À plusieurs occasions, la Force d'intervention de l'aéroport se met en état de préparation pour mettre en pratique ce qu'elle prêche. Heureusement, le commandant turc se montre toujours coopératif.

Le cessez-le-feu subséquent prévu pour 1400 hrs ne dure que trois minutes. Même si la deuxième journée de l'offensive est bien remplie, elle est relativement paisible comparativement à la première. Les troupes stationnées au Ledra Palace passent la journée à améliorer leurs positions défensives. Tôt le matin, le commandant du régiment ordonne que le PO CORNARO soit réoccupé, car l'observation sur le champ de bataille nord-ouest de la ville est très importante.

Les forces turques dans le secteur de l'aéroport effectuent des missions régulières de ravitaillement et de réapprovisionnement; elles n'ont pas vraiment essayé de prendre le camp du contingent des nationaux grecs ou le lycée. Après coup, on peut dire que la deuxième journée de l'offensive a été axée sur le maintien des positions actuelles, tandis que l'artillerie et les mortiers des deux camps ont tiré avec une précision accrue. Les «Forces de paix turques» ont réalisé la majorité des gains dans les autres parties de l’île. Tout comme pendant les nuits précédentes, les deux camps ont poursuivi leurs tirs sporadiques.

JOUR 3

Le 16 août, à 0600 hrs, les F-100 font leur patrouille matinale dans le secteur du lycée. Cette fois, deux tirs directs endommagent sérieusement la structure. Environ trois heures plus tard, le coup de sifflet familier se fait entendre et l'infanterie turque, presque de la taille d'un bataillon, avec six M-48, commence à attaquer le camp du contingent des nationaux grecs et le lycée. Même si l'attaque se déroule comme il se doit, la file étendue devient vite parsemée et éclaircie, car plusieurs soldats tombent sous les tirs d'armes légères et d'artillerie extrêmement précis. Le combat fait rage toute la journée, les Grecs abandonnant du terrain seulement après de fortes pressions.

Pendant que ce combat fait rage, le calme dans le secteur du PO CORNARO, réoccupé depuis la veille, est rompu par l'éclatement de violent combat; les Turcs essaient de prendre la prison centrale. Si elle cède la zone de la prison centrale, qui est fortifiée et défendue par une compagnie appuyée de mortiers, la Garde nationale sera obligée d'abandonner ses positions du côté est, de la rivière Pedios, isolant les autres positions du côté est près des casernes Wolseley et du Ledra Palace. Ce saillant de la Garde nationale est également un saillant du contingent canadien, puisqu'il occupe le camp Kronberg près de la prison centrale, des casernes Wolseley et de l'hôtel Ledra Palace.

Revenons maintenant au sgt S.M. Gallant et à sa troupe au PO CORNARO. À 0926 hrs, peu de temps après le début des hostilités, le cpl Lotoski et le para Alderson sont coincés par le tir sur le toit de l'hôtel depuis cinq minutes. Les observateurs importuns quittent finalement leur poste pour trouver refuge au sous-sol. Vingt minutes plus tard, ils regagnent leur position sur le toit, mais ils sont immédiatement repérés et attirent les tirs des deux camps. Le cmdt du 2e Cdo demande au commandant de régiment la permission de récupérer cette section de l'hôtel. Sous les tirs et le lancement presque raté de deux bombes de 500 livres dirigés vers la prison centrale, l'évacuation s'effectue au moyen de deux TTB et de deux Lynx placés sous le commandement du It Ross (LdSH(RC)).

Dans l'intervalle, anticipant l'abandon par la Garde nationale grecque du saillant mentionné plus haut, soit le secteur du camp Kronberg, des casernes Wolseley et du Ledra Palace, le commandant du régiment ordonne au QGET du Régiment aéroporté, au 1er Cdo et à la section de génie attachée au QG du régiment de préparer la défense du secteur et de n'accepter aucun «passage» dans les zones contrôlées par les Nations Unies. Les unités sont prêtes à suivre les ordres; les armes d'appui et les obstacles de barbelés sont en place. Des instructions de dernière minute sont données au personnel. Les commandants locaux des Grecs et Turcs sont informés qu'aucun soldat armé ne sera admis dans les zones contrôlées par les Nations Unies, à moins qu'ils n'acceptent de rendre leurs armes aux Nations Unies... une autre façon de garnir le musée du régiment. Si les Turcs avaient réussi à passer et à prendre la prison centrale, le QG du régiment et le 1er Cdo auraient été pris en «sandwich».

À 1505 hrs, on apprend que les Turcs instaureront un cessez-le-feu sur toute l'île à 1800 hrs. D'ici-là, la plus grande partie de l’île, de Morfou à Famagusta, sera sous leur contrôle.

À 1800 hrs pile, le cessez-le-feu entre en vigueur et au même moment le drapeau national de la Turquie est hissé sur le toit du lycée.

Même si l'on avait attendu longtemps ce cessez-le-feu, le seul qui devait durer, il y eu encore des tirs sporadiques lorsqu'à 1935 hrs, le col Beattie appelle le Centre des opérations interarmées du contingent canadien pour savoir si sa maison et celle du commandant de la Force sont toujours intactes. La réponse est affirmative.

Au nombre des tâches prioritaires à exécuter la journée suivante, figure l'affirmation de la présence des Nations Unies entre les deux camps et l'établissement d'une nouvelle ligne de démarcation. Le commandant du régiment informe le maj Zuliani, le major du régiment, en conséquence. À 2021 hrs, le major émet des ordres de patrouille, la tâche générale étant de confirmer la ligne sud des forces turques. Cette tâche devait se poursuivre les jours suivants.

Encore une fois la nuit est ponctuée d'échanges de tir d'armes légères, mais il n'y a pas de grand déploiement de troupes. Le 17 août, À 0054 hrs, le QG FNUC, met en garde tous les contingents contre les mines placées sur les routes où la Garde nationale s'est repliée. Cet avertissement survient après la mort de deux soldats danois dont le véhicule a heurté une mine près d'Ambelikou. On fait par la suite savoir que ces champs de mines sont marqués par deux roches placées de chaque côté d'une route ou d'un sentier.

Cette précaution est presque inutile, car toute l’île est recouverte de petits amas de roches. Néanmoins, bon nombre de patrouilleurs canadiens se sont soudainement changés en «guetteurs de roches»

JOUR 4

Tôt dans la matinée du 17, des patrouilles de la Cie F du 2e Cdo mènent des opérations dans le secteur de Kronberg. En fait, à l'exception de l'occupation de l’hôtel Cornaro par les FCT, aucun camp n'a pris une avance significative. D'après les dommages causés et les armes abandonnées, les combats étaient rapprochés et semblaient assez violent. Chose étonnante, la Garde nationale a abandonné ses positions sur les rives de la Pedios. Elle s'est repliée 200 mètres à l'arrière, à un immeuble à appartements. L'heure du repli demeure inconnue, mais les FCT n'ont pas tiré profit de la situation.

Vers 0900 hrs, le commandant et le sergent-major du régiment font une visite dans le secteur lorsqu'ils remarquent que le Haut-Commissariat de la Grande-Bretagne est occupé par la Garde nationale. Ils continuent à rouler sur la rue Ayios Diomidi, rue sans issue située sur la rive ouest de la Pedios, lorsqu'un soldat des Forces chypriotes turques (FCT) sort de derrière une maison et pointe son arme dans leur direction. Les soldats des FCT, s'étant aperçu que la Garde nationale avait abandonné ses positions, avaient traversé la rivière (pour la première fois en 10 ans) et pillaient les résidences des riches Chypriotes.

Le commandant du régiment rapporte la situation au QG du régiment et ordonne au 2e Cdo de repousser les FCT de l'autre côté de la rivière. Se succèdent alors une série d’incidents intenses suite à la première violation du cessez-le-feu par les FCT dans ce secteur, incidents impliquant l'équipe du commandant du régiment, de la compagnie du capt Peterson et du cmdt 2e Cdo. La haine que chacune des factions nourrit l'une envers l'autre et le peu d'importance qu'elles attachent à la vie humaine ressortent de ces incidents. À une occasion, un ami du chef des FCT est coincé à l'extrémité d'une rue grecque et il est sur le point d'être abattu de sang froid. Heureusement, la troupe du commandant du régiment se trouve sur place, se porte aussitôt à l'aide de celui-ci et fait venir un TTB pour les cueillir. Voyant le danger que courent son ami et les Canadiens qui tentent de le sauver, le chef des FCT pointe son Thompson chargé à la tête du cpl Hartnett en disant, «Je suis désolé, mais si mon ami se fait tuer, je te tue.» Le capt Peterson et son chauffeur se trouvent seuls et entourés des FCT à l'extrémité de la rue. À ce moment, la cie E arrive appuyée de TTB et d'un Lynx. Quel réconfort que de voir la troupe se déployer, vêtue de casques d'acier et de gilets pare-éclats, et prête à faire feu. Chacun sait que les FCT sont entêtées, mais il y a un «langage» qu’elles comprennent et ce matin-là elles comprirent. Elles acceptent de se replier et le maj Corbould escorte les FCT que nous tenions en «hôtages» de l'autre côté de la rivière.

Au cours des trois semaines qui suivent, le maj Corbould et sa troupe ont à faire face à deux autres incidents plus graves dans le même secteur. Au cours d'un de ces derniers, il reçoit le célèbre ultimatum de la part des FCT: «Vous avez cinq minutes pour déguerpir sinon ...». Le maj Corbould lui répond: «Sinon quoi?» La décision commandant du régiment «ne pas bougez pas». Pendant ce temps, la batterie se déploie en l'appui du 2e Cdo. Ces cinq minutes semblent une éternité et l'atmosphère est électrisante. Une fois encore, les Forces des Nations Unies ont gagné la partie, mais elles ont dû se montrer ferme. Dans ce secteur, maintenant sous le contrôle des Nations Unies, se trouve le Haut-Commissariat de la Grand-Bretagne et une majestueuse Bentley (la limousine du haut-commissaire) y est stationnée; elle risque évidemment de devenir un souvenir de guerre ou, au pire, d'être détruite. Refusant cette éventualité, le commandant du régiment donne l'ordre pour qu'elle soit transportée dans le secteur du 2e Cdo où elle servira de voiture d'état-major personnel à un certain cplc McDonald (Boots). Promu rapidement du rang de propriétaire de Mercedes Benz aux sommets vertigineux de propriétaire de Bentley, le cplc McDonald utilise la voiture pour effectuer des visites dans des endroits éloignés comme le camp des Bérets bleus. Mais, il doit bientôt céder sa limousine au lcol Morris (commandant des 16th/5th Lancers) qui en a besoin pour impressionner les soldats turcs qui ont franchi la route de Morfou et se trouvent un peu trop près du secteur de logements familiaux de la RAF, à Nicosia.

Pendant ce temps, les Nations Unies sont à l'oeuvre. Vers 1445 hrs commence le transport des dépouilles, tâche qui prendra environ deux jours à remplir L'incident démontre cependant le temps qu'il faut aux Grecs et aux Turcs pour transmettre les ordres à leurs commandants locaux.

Un fait morbide se produit lors de l'enterrement des cadavres quand un soldat de la Garde nationale déterre le cadavre de son frère.

Pendant toute la journée, le cessez-le-feu est violé par des tirs d'artillerie et d'armes légères. Dans le village grec de Pyroi, au sud-est de Nicosie, les positions de la Garde nationale sont bombardées par les Turcs. La situation se détériore et, vers 1730 hrs, les Turcs entourent la ville. La Garde nationale n'a perdu que quelques soldats au combat, mais deux chars. Un de ses chars réapparaît plus tard dans la ville de Louroujina, une étoile rouge et un emblème peints sur la tourelle.

Le dernier incident de la journée se passe à 2345 hrs; le bureau du vice-président se plaint alors qu'un PO des Nations Unies près de l'hôtel Cornaro oriente ses projecteurs vers les Turcs. En fait, les «projecteurs» en question sont la lanterne Coleman qui éclaire la poste... les choses sont plus ou moins revenues à la normale.

La phase deux de l'offensive turque est terminée.

CONCLUSION

Pendant les quelques semaines qui suivent, le Régiment déploie de gros efforts pour établir fermement une ligne de démarcation entre les belligérants. Cette tâche présente de grands risques en raison des nombreux champs de mines non marqués, de l'agressivité de l'armée turque et de ses continuelles tentatives pour prendre du terrain. Nos sapeurs et la troupe de reco du LdSH(RC) participent activement à cette opération. La troupe de reco à fait un travail remarquable et elle fait l'envie du Régiment. L'ensemble de l'opération se révèle un succès et la nouvelle zone de Nicosie (Est) est la première et de loin à tracer un plan détaillé des nombreux champs de mines et des lignes défensives des deux camps.

Nos troupes se trouvent sous le feu à quelques autres occasions. Le major du Régiment, le cmdt du 1er Cdo, et l'officier de liaison turc doivent, à une occasion rester dans un fossé pendant au moins 10 minutes. La morale de cette histoire: ne jamais s'aventurer sur la ligne de défense avancée la nuit en provenance du côté grec même en compagnie d'un officier de liaison turc. C'est cette nuit-là que le para Berger a été tué, drame qui suscita une enquête.

Pendant les mois d'octobre et de novembre, le 1er Cdo est dans le secteur sud et dans celui de Louroujina. Il est chargé de mettre un terme aux combats armes qui surgissent la nuit dans les murs de la vieille ville; il doit entre autre organiser la force de sécurité lors des échanges de prisonniers de guerre et des réfugiés dans le secteur du Ledra Palace.

Lorsque notre première équipe rentre au Canada, nous avons tous hâte de retourner chez-nous. Nous sommes venus à Chypre pour remplir une mission, et nous l'avons accomplie... il est temps de repartir.

ASPECTS HUMANITAIRES

ASPECTS ECONOMIQUES

Voici un récit qui, par son style libre, peut refléter le travail extrêmement intéressant et enrichissant accompli par cette cellule de la zone de Nicosie (Est). Sa tâche n'était pas du tout banale Même si le langage l'était. Elle comportait à la fois des dangers et des frustrations, car la troupe vivait continuellement dans un climat de haine lorsqu'elle voulait obtenir la coopération de l'un des camps avec l'autre.

Selon des sources officielles, les Turcs ont capturé 48 000 ports (ainsi que 280 000 moutons et chèvres, 1 400 000 poulets et 12 000 vaches) lorsqu'ils occupaient 40% de Chypre. Malheureusement, les Turcs n'aiment pas le porc. Ainsi, je suis en train d'escorter un fermier chypriote grec et son épouse à leur porcherie située à proximité des nouvelles lignes turques et très loin de la position grecque la plus rapprochée. Il y a une senteur qui se dégage, car plus de 600 porcs sont maintenant morts dans leur enclos et qu'à part un trillion de mouches et 12 porcs, très maigres, nous sommes les seuls êtres vivants.

Nous nous sommes battu contre un porc dans le camion grec (l'adj Smith soigne la blessure au genou que lui a fait l'animal) et, pendant que deux membres de l'escadron de para britannique montent la garde dans leur ferret, mon chauffeur et moi essayons de capturer un autre animal. Comme je tourne le coin d'un immeuble, corde à la main, je me retrouve face à face avec six Turcs prêts à tirer. J'essaie de leur parler mais notre langage semble incompatible et je n'arrive pas à trouver le mot «porc» dans man livre d'expressions turques. Il aurait peut-être mieux valu que je me retrouve dans un poulailler?

Un petit mot à Lavoilette (mon chauffeur) et il envoie les Grecs mordre la poussière. Nous sourions lorsque l'interprète, qui arrive aussitôt, nous explique que la ferme est placée sous le contrôle des Turcs et que nous ne devons pas revenir. Je lui fait remarquer les dangers pour la santé, (ainsi qu'a son administration), j'y retourne seul deux jours plus tard; les animaux mort sont recouvert de chaux et les vivants n'y sont plus.

Il s'agit-là de tâches courantes du bureau des affaires économiques et humanitaires du contingent canadien (Ops E), constitué d'un officier, d'un adjudant, d'un chauffeur, de deux ferrets (plus l'équipage), de quiconque nous pouvons persuader de travailler, et de nombreux bénévoles. Deux jours auparavant nous avons «aidé» cinq familles grecques à sortir leurs meubles de leur maison qui se trouvaient à proximité des lignes turques. Cette fois, nous étions entourés de tout un peloton turc et il nous a fallu 15 minutes pour calmer une vieille dame grecque assez longtemps pour qu'elle déménage à Nicosie... avec ses effets, heureusement. Plus tard, elle nous a offert une bouteille de vin, peut-être en remerciement ou parce qu'elle sentait que nous en avions besoin. C'était une dame chanteuse... environ 200 000 autres Chypriotes étaient des réfugiés, vivant dans des tentes, ne possédant que les vêtements qu'ils portaient.

Les canadiens étaient chanceux aussi, car seulement 20 000 réfugiés avaient besoin d'eux dans leur district. Avant que la Croix-Rouge et les organismes de bien-être ne s'organisent, les patrouilles canadiennes ont livré des tonnes de vivres et de fournitures, des tentes, des couvertures, et des lits de camp. Plus tard, elles ont aidé la Croix-Rouge à distribuer les messages aux familles en provenance et à destination des villages turcs. Les jeeps blanches des Canadiens sont vite devenues le seul moyen de communication avec l'extérieur. Nos médecins ont soigné tellement de villageois à Kochati qu'ils songeaient à y déménager la salle d'examen médical. Le fait que 400 personnes puissent être aussi souvent malades demeure un mystère médical.

L'adj Smith surveillait l'exécution de travaux en électricité à la ligne verte pendant que l'escadron de para monte la garde. À présent, nous avions établi un climat de confiance et les électriciens turcs et grecs travaillaient cote à cote. Après tout, nous avions escorté les électriciens tous les jours pendant environ deux mois lorsqu'ils réparaient les centaines de pannes dans les lignes à haute tension ainsi que les lignes d'alimentation des villages sur toute la ligne de confrontation. Un soldat nerveux de la Garde nationale laisse échapper un tir de mitrailleuse, Smitty amène le soldat par le collet à son commandant local, qui avait autorisé la poursuite des travaux. Le climat de confiance régnait toujours.

Immédiatement après le cessez-le-feu, nous avons fourni des escortes pour les réparations des conduits d'eau. Il fallu cinq jours pour rétablir le service d'alimentation d'eau à Nicosie. Mais en campagne, les vergers sont demeurés des semaines, voire des mois, à sec et sont morts. En fait, 80% des plantations d'agrumes se trouvent dans le «nord» maintenant, et il faudra à certains plus de 10 ans avant d'atteindre leur plein rendement. Les agrumes constituent la principale source d'exportation de Chypre.

Les Turcs détiennent actuellement le contrôle d'une zone responsable de 70% de l'économie chypriote sous diverses formes: agriculture, élevage, mines, ressources minérales, et industrie. Aussi, la majeure partie du commerce touristique se passe à Kyrenia et à Famagusta. «L'Ops E» reçoit des demandes pour récupérer des biens, protéger des terres et la propriété, retourner des travailleurs, abreuver des animaux ou arroser des récoltes de presque tous les chypriotes grecs qui vivaient sur le territoire occupé. Nous ne pouvons que leur dire que les autorités turques ne nous permettent pas d'y aller.

En outre, nombreuses sont les personnes qui chaque jour nous demandent de «libérer» un de leurs proches. Nous avons réussi à l'occasion, mais lorsque nous leur disons que «nous essaierons» , c'est seulement pour leur donner un peu d'espoir.

Généralement, les Chypriotes nous perçoivent bien. Ils viennent vers les le Canadiens, car ils connaissent la «volonté de faire» du régiment aéroporté. Et, si nous le pouvons, nous les aidons. Je me souviendrai toujours de l'écriteau placé à l'extérieur d'un camp de réfugiés de notre district. Un parachutiste sous sa voilure déployée y était dessiné à la main et la mention suivante était inscrite: «Bienvenue à tous les Canadiens, sauf ceux qui ne boivent pas de thé.» J'imagine que nous buvions tous du thé.